« Je suis tombé malade »
En voilà une expression pas banale.
Trébucher sur la maladie pour vous aplatir sur le tapis de la vie. Des mots explicites pour exprimer l’illicite.
Posé là au milieu de la voie, la maladie attend, sagement, au milieu de la foule, elle se met en boule et à votre passage vous barre les genoux pour vous briser le cou.
Tomber malade c’est rester à terre quand les autres sont debout, c’est embrasser la misère quand la vie ne pense plus à vous.
C’est tomber du train en marche et laisser ses amis qui lentement se détachent.
C’est boire la tasse en regardant le paquebot du monde regagner le port d’attache.
Tomber malade,
On court innocemment dans le troupeau, dans la masse, on rit et on espère qu’elle nous évite, cette maladie, ce cancer, cette appendicite. Tomber c’est se retrouver seul, c’est voir le monde d’en bas, c’est crier en vain dans le brouhaha, c’est contempler la vie et les autres sans participer au débat.
Alors on essaie de se relever, de paraitre solide sur sa béquille, mais rien n’y fait, la maladie vous accroche et vous amoche, elle vous lie, vous taquine, vous nie et vous enracine dans la terre meuble damé par la danse des autres qui pensent à eux.
Mais heureusement il y a les releveurs, les empêcheurs de disparaitre, les sauveurs d’être, ceux qui s’agenouillent et vous redressent.
Jamais complètement debout, jamais complétement couché, les soignants sont là pour vous sortir du lot et vous remettre à flots.
Tomber malade c’est trébucher sur les faiblesses d’un corps qu’on a loué à vie et sans aucune garantie.
Tomber malade,
Quelle drôle d’expression, je ne sais pas si l’on tombe malade, mais je sais que les malades tombent et nous sommes là pour les relever.
Alors tombe, tombes, tombe, tombons, tombez, tombent et relève, relèves, relève, relevons, relevez, relèvent.
Iconographie: L'arrivée du Marié par Paul Klee
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