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Photo du rédacteurLes carnets d'Asclépios

EDWARD ET WILLIAM LES HERETIQUES

Dernière mise à jour : 16 juin


Au commencement, dieu créa le ciel et la terre puis il créa la lumière et l’eau. Ensuite Dieu créa la verdure et les étoiles puis les animaux. Enfin, Dieu créa les Hommes et les Femmes, puis, dans sa grande sollicitude, son infinie sagesse et parce que Dieu est joueur, il créa la variole et Dieu vit que c’était bon.


3000 ans avant Jésus Christ apparait une peste qui fait des ravages. La période n’a rien à voir avec la genèse, mais l’humanité commence à se constituer en amas, comme des bactéries, dans des unités que l’on appelle les villes. La densification de la population permet donc la dissémination des virus et la naissance des épidémies. L’un de ces virus va tirer son épingle du jeu permettant ainsi de limiter l’expansion de l’humanité, j’ai nommé le poxvirus le plus swag de l’histoire, celui qui se fait appeler la petite vérole ou plus sobrement « variole ».

L’ensemble des connaissances et des techniques de l’époques étant limités, les épidémies étaient catégorisées sous l’étiquette de « peste ». Probablement que nombre d’hécatombes de l’antiquité étaient en fait l’œuvre de notre petite vérole. Cette maladie virale extrêmement contagieuse a la particularité de cumuler ce qu’il manque encore à nos petits joueurs actuels que sont la grippe ou le coronavirus, c’est-à-dire une contagiosité importante et un taux de mortalité plus que respectable qui culmine à trente pourcent pour les formes magnanimes et à quatre-vingt-seize pourcent pour les formes un peu plus sportives. Pour les petits chanceux qui s’accrochent à la vie, il reste les complications qui font suite à la maladie. Après plusieurs mois de convalescence, les infections bactériennes opportunistes terminent le travail. Pour les autres il reste les atteintes d’organes nobles, les défigurations suite à la phase vésiculeuse, les déformations articulaires et plein d’autres petites joyeusetés divines.

Si l’épidémie à fait souffrir l’Europe pendant des millénaires, elle sera d’un grand secours lors de la conquête du nouveau monde. L’humanité n’a pas encore compris les subtils principes de microbes et de contagion, mais elle sait faire preuve de génie dans ses expansions guerrières. Ainsi, les espagnols auront la finesse d’esprit de fournir au aztèques de magnifiques présents imprégnés des miasmes de patients atteints de la variole. De trente millions, il n’en survivra que cinq pourcent. La première guerre bactériologique était née et ainsi l’expansions culturelle européenne ainsi que la christianisation du monde se voyait ouvrir un boulevard en Amérique du sud. Après avoir accroché les égyptiens, les grecques, les romains, les européens, les chinois et les aztèques à son tableau de chasse, la variole blasée des tueries de masse se diversifie et elle cible une tête couronnée. C’est louis XV qui succombe à la maladie.


C’est alors qu’un anglais va avoir une idée révolutionnaire. Edward Jenner, scientifique qui brille par sa soif d’expérimentation, se fait reconnaitre par ses clairvoyances intellectuelles en médecine mais également en sciences naturelles. Mais c’est pour une raison précise que l’on se souvient de lui, il est communément reconnu comme le père de la vaccination. Même si le procédé balbutiait dans la campagne anglaise depuis une vingtaine d’années, Jenner va l’expliquer, le développer et l’universaliser. En effet, il s’avère que la variole ne touchait pas l’ensemble de la population de manière homogène. Une partie des habitants semble immunisée ; Il s’agit des agricultrices de filière bovine. L’origine de la découverte commence, comme souvent, par des questions : Pourquoi la filière bovine et pourquoi les agricultrices ? Á l’époque, ce sont les femmes qui sont assignées à la traite des vaches. Le médecin remarque que les vaches transmettent le cowpox, une maladie très semblable à la variole mais qui se développe sur les avant-bras et qui disparait sans séquelle. Devant la similarité de la maladie, que l’on nomme vaccine, avec sa cousine la variole et devant l’immunité apparente à la variole qu’ont les femmes ayant contractées la vaccine, Jenner décide de tenter une expérience. Il injecte à un enfant du pus de vésicule ponctionnée dans le bras d’une jeune anglaise atteinte de la vaccine. Comme on ne s’encombre pas de l’éthique à l’époque, Jenner jette l’enfant au milieu de malades de la variole. Miracle, l’enfant ne déclare absolument aucun signe du virus mortel. En 1796, Jenner invente la vaccination, cette découverte impie est décriée par tous les grands tenant de l’autorité scientifique de l’époque. La communauté pensante, dans sa grande réflexion, redoute que les individus vaccinés se voient pousser des cornes bovines sur la tête. Un hérétique va tout de même donner sa chance au procédé. Ce petit écervelé n’est autre que Napoléon Bonaparte qui décide de vacciner la Grande Armée avant d’envahir les nations atteintes par le paxovirus.

Prométhée offrit le feu, Edward proposa le vaccin. Le monde possède maintenant l’antidote à la malédiction. Mais si certaines populations, notamment occidentales, sont bien protégées de la maladie, celle-ci continue de circuler dans les pays sous dotés. Les pays riches modernes, inquiets pour leur confort, décide par l’intermédiaire de l’OMS de mener l’ultime bataille contre le mal millénaire. Malheureusement, il faut couvrir quatre-vingt pourcent de la population mondiale pour annihiler l’ennemi. C’est impossible. Les laboratoires sont dans l’incapacité de fournir les doses suffisantes. C’est là qu’apparait le second pourfendeur de la maladie, William Foege. Cet épidémiologiste américain a l’idée ingénieuse d’encercler la maladie. Il va mener une campagne de vaccination seulement chez les populations saines en contact direct avec des populations infectées. En quelques années c’est la bérézina pour la variole, elle disparait de la surface du globe. En 1980, l’humanité déclare cette maladie comme une espèce disparue. Voilà comment le génie humain a éradiqué la bête. Mais Dieu fit l’homme à son image et dans un élan de remords, décide, tel Noé, de garder quelques échantillons du virus dans plusieurs laboratoires perdus quelque part sur cette petite planète.


Dans ce monde où chacun se pense pourvu de suffisamment de bon sens, sur une terre plate gouvernée par des reptiliens, il ne reste que peu de place aux théories scientifiques et autres inepties éprouvées qui ont un jour été érigées en doctrines sauveuses de l’humanité. Les naturopathes et autres grands penseurs de l’immunité naturelle doivent amèrement regretter ce monde merveilleux où les divins virus accomplissaient de manière naturelle l’œuvre du tout puissant… C’était indéniablement mieux avant.


« Ne croyez pas, essayez » William Harvey





Iconographie: Adam et Ève et le Fruit défendu, Lithographie de Marc Chagall





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