L’allégorie de la caverne, connue comme le cauchemar des lycéens, est une métaphore exposée par Platon et recueillie dans l’ouvrage La République.
Des Hommes sont attachés devant un mur au fond d’une caverne.
En arrière, sur un promontoire rocheux brûle un feu. Devant ce dernier, un chemin sur lequel passent d’autres Hommes. Plus loin, en remontant après le feu, la sortie de la grotte et la lumière du soleil qui se laisse deviner.
La lecture à faire est que les Hommes qui sont maintenus devant le mur ne voient du monde que les ombres qui s’y projettent. Ils ont donc une vision tronquée de la réalité qu’ils tiennent pour seule vérité puisque qu’ils n’ont jamais vu que cela.
On en retient donc le principe d’opinion confuse. Une vision altérée du monde qui est tenue comme vérité par les uns mais sans être le réel.
La suite de la description nous explique que si l’on détache ces personnes, elles pourront ainsi se retourner et évoluer pour découvrir progressivement d’autres points de vue sur le monde permettant, en assimilant ces strates, d’accéder à une opinion vraie.
Il se pose la question de la capacité à réviser ses opinions lorsque l’on comprend tard que ce que l’on tenait pour acquis n’est en fait qu’une déformation de la réalité. Quid de la capaciter à renaitre à la lumière lorsque nous sommes restés dans l’obscurité tout notre vie ?
Et bien cette image s’applique étonnamment bien à la connaissance du corps humain et à la Médecine. Voyez l’organisme comme une caverne à l’extérieur de laquelle nous serions enfermés. Enfermés dehors en somme. La vision que nous aurions du corps humain serait donc celle que tout un chacun a lorsqu’il contemple ses congénères. La vision extérieure permet d’analyser les téguments, les organes visibles comme les yeux, les tympans, les orifices. Si l’on touche ce corps, il est possible d’imaginer ce que l’on touche mais comme les ombres sur le mur, nous ne voyons que le reflet d’éléments qui nous sont invisibles. Passons ensuite au palier anatomique permis par la dissection, l’autopsie, la chirurgie, la radiologie. Nous avons une vision plus claire de l’organisation interne sans connaitre les mécanismes d’interaction. Vient ensuite la biologie qui permet de comprendre le fonctionnement cellulaire, les environnements hormonaux, enzymatiques, immunologique, …
Lorsque l’on pense avoir pénétré au plus profond de la tanière humaine, se dessine la génétique, l’épigénétique, le neuronales, l’interstitielle, la chimie, biochimie, la physique quantique et ainsi de suite.
Chaque découverte nous rappelle à notre ignorance encore manifeste et ainsi, comme les différentes couches d’un oignon, nous entrons toujours plus en profondeur.
Nous pensons toujours être à l’avant-garde des savoirs mais il ne faut jamais oublier que nous restons ignorant des couches inférieures de la connaissance qu’il reste à découvrir.
La médecine et ceux qui la pratiquent sont trop souvent bercés dans l’orgueil et certains d’être à la pointe de la science actuelle se voyant donc comme bien plus avancés que leurs aïeux. Nous ne sommes pourtant que les ignorants de demain.
Je pense qu’il n’y a pas de médecine sans philosophie. Elle nous permet de revenir à notre humble condition de profane de la mécanique humaine.
Il faut se prémunir de vouloir essentialiser l’humain et ces mécanismes. Trop souvent l’on décrit des mécanismes physiopathologiques étudiés in vitro et dont l’extrapolation in vivo est démenti par la pratique empirique.
Ma vision sera plus stoïcienne, prenant la nature comme éthique et donc la clinique comme boussole.
« Tout ce que je sais, c’est que je ne sais rien »
Socrate
Iconographie: Self imposed misery par Tim Noble et Sue Webster
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